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PORTRAIT EXCLUSIF RESULTANT DE L’INTERVIEW ACCORDEE AU MAGAZINE DIRIGEANTES :
De ses origines à son parcours professionnel, l’Afrique reste le dénominateur commun du projet de vie de cette dirigeante remarquable. C’est aussi dans l’amour de sa famille que cette épouse et mère de deux enfants puise la force pour relever ses challenges quotidiens et son engagement pour les femmes.
L’Afrique chevillée au corps
Née d’un père Sénégalais et d’une mère originaire de Gambie et de Sierra Leone, Mareme MBAYE NDIAYE a grandi au Kenya et en Côte d’Ivoire. Avec cet important héritage panafricain fruit d’une éducation façonnée dans ces 5 pays, elle en a fait une force. « Cela m’a fortement exposée et de manière précoce à différentes cultures africaines, ce qui m'a préparée à être à l'aise dans des environnements multiculturels. Peut-être que cela me préparait pour mon futur parcours professionnel sans que je le sache! Plus sérieusement, j'ai gardé de ce contact avec notre patrimoine culturel un grand sens des valeurs, de la culture, de l'appartenance, de la passion pour mon continent bien-aimé, de la responsabilité et du désir de servir ! » assure Mareme MBAYE NDIAYE.
L’attachement à l’Afrique est tellement fort qu’un diplôme obtenu dans une prestigieuse université nord-américaine n’influença en rien sa trajectoire professionnelle. En effet, la Directrice Régionale Afrique Centrale et de l’Est de Société Générale est titulaire d’un Master in Science Management (Msc) en Economie Financière obtenu, en 2001, à l’Ecole des Hautes Etudes Commerciales (HEC) de Montréal au Canada.
Alors qu’avec ce sésame d’une des universités les plus cotées en Amérique du Nord, beaucoup cherchent un emploi au Canada, Mareme MBAYE NDIAYE n’a qu’une obsession : celle de rentrer en Afrique. « J’avais hâte de retourner sur le continent et d’exercer dans le secteur financer, afin de travailler au développement de solutions bancaires à destination de nos concitoyens et nos entreprises. J’étais en effet convaincue que l'accès au financement ouvre la voie à de nombreuses autres opportunités. » confie-t-elle au magazine Dirigeantes, leadership au féminin.
Près de 20 ans après ce retour, en Afrique, juste après l’obtention de son diplôme, Mareme MBAYE NDIAYE ne cache pas sa satisfaction « Aujourd'hui, je suis heureuse d'avoir pris cette décision de rentrer en Afrique, car mon parcours professionnel a, jusqu'à présent, été particulièrement enrichissant, du fait des environnements et des personnes formidables que j'ai rencontrées au fil des ans. »
Nomination au poste de DG à 32 ans et ascension fulgurante au sein d’ECOBANK
C’est dans le domaine commercial que la jeune diplômée fraichement rentrée du Canada débute son parcours professionnel en Afrique. En 2010, Mareme MBAYE NDIAYE est promue Directrice Générale d’Ecobank Gambie. A 32 ans, il s’agit de son premier poste de top management. « Une expérience particulièrement stimulante pour moi » se souvient la DG. Cette première opportunité à la Direction Générale d’une filiale d’Ecobank sera le début d’une ascension fulgurante au sein du Groupe bancaire panafricain. Après 5 ans passées en Gambie, Mareme MBAYE NDIAYE prend la Direction Générale de la filiale rwandaise.
Le séjour à Kigali dure à peine un an et quatre mois puisqu’elle est rappelée au siège à Lomé, en juillet 2016 au poste de Directrice du Cabinet du Directeur Général du Groupe en charge de la Stratégie et du « Business Process Management » et du Contrôle Interne. Avant de quitter le la banque panafricaine 2018, Marème MBAYE NDIAYE a occupé plusieurs hautes fonctions à responsabilité. On peut citer notamment la participation au Conseil d’Administration de plusieurs filiales d’Ecobank (Côte d’Ivoire, Burundi, Gambie et Rwanda), de la Société d’Investissement Obligataire Convertible du Groupe et d’Ebobank Development Corporation (EDC) Middle Africa Bond Index Fund.
Elle a aussi présidé le Comité Technique de la Conférence des Leaders du Groupe Ecobank en 2018, le Comité d’Organisation de la « Journée Ecobank » de 2017 sur les activités de Responsabilité Sociétale du Groupe Ecobank et le Comité Technique de la Session Stratégique des Présidents de Conseils d’Administration des filiales du Groupe en 2017. Elle a aussi été Secrétaire du Comité Exécutif du Groupe Ecobank.
Première femme Directrice Générale de Société Générale Cameroun
En janvier 2019, Mareme MBAYE NDIAYE est à la tête de la filiale camerounaise du groupe bancaire français. Elle est ainsi devenue la première femme Directrice Générale de Société Générale Cameroun qui est l’une des plus grandes banques du pays avec 650 salariés. L’année 2019 a aussi été marquée par de nombreuses autres nominations à des postes à responsabilité. Mareme MBAYE NDIAYE est Conseillère du Commerce Extérieur de la France et siège au Conseil d’Administration d’ADVANS Cameroun, de Société Générale Burkina Faso et de la Bourse des Valeurs Mobilières d’Afrique Centrale (BVMAC) où elle préside le Comité d’Audit et des Comptes.
Mais qu’est ce qui a poussé Mareme MBAYE NDIAYE à rejoindre la multinationale française ? « L’une des raisons qui m’ont motivée à rejoindre le Groupe Société Générale c’est justement son investissement dans les femmes et les hommes du continent. Notre Groupe est porteur d’une vision, matérialisée par un engagement à travers le programme « Grow with Africa », qui ambitionne, au moment où d’autres groupes internationaux se retirent de notre continent, d’offrir aux économies africaines la capacité de se projeter dans l'avenir, à travers un soutien multiforme aux PME, le financement des infrastructures, l’investissement au bénéfice d'une agriculture durable et des énergies renouvelables, ainsi que la promotion de l'inclusion financière. » Telle est sa réponse.
Pour appuyer ses propos, elle énumère quelques réalisations : « En juillet 2019 nous avons inauguré une Maison de la PME à Douala, qui depuis son ouverture accompagne de nombreuses femmes porteuses de projets dans divers domaines. En moins d’un an d’activité, nous avons pu accompagner plusieurs centaines de structures et d’entrepreneurs dans leur projet, à travers un suivi, du conseil et aussi du financement. A travers un mécanisme de centralisation des services financiers et non financiers offerts par des partenaires spécialisés, tant étatiques que privés, locaux qu’internationaux, nous arrivons à faire du « upscaling » ou du compagnonnage dédié dans des domaines aussi variés que la comptabilité, le juridique, la fiscalité, le marketing, la formation, entre autres. Les initiatives menées avec la Cameroon Women Entrepreneuship ou Ecam au Féminin illustrent cet investissement. »
La force de la richesse multiculturelle pour la transformation des situations difficiles en opportunité
Les leitmotiv de Mareme MBAYE NDIAYE sont de travailler dur et de sortir de sa zone de confort. Ce sont ces engagements de vie qui ont forgé son attitude. « Mes parents m’ont enseigné que le travail acharné mène loin dans la vie. Quant à l’envie de brise ma zone de confort, elle m'a guidé à toujours accepter de nouveaux défis et à me donner au mieux de mes capacités. » précise-t-elle au magazine Dirigeantes, leadership au féminin. Et poursuit « Pour avancer dans la vie, il faut croire en soi, se fixer des objectifs et s’organiser pour les atteindre. Dans cette démarche, il faut pouvoir transformer chaque situation difficile en une opportunité de faire la différence, en gardant en tête le but que l’on s’est fixé mais également ses valeurs, le tout dans une démarche d’humilité et de générosité. »
Et c’est dans son expérience multiculturelle africaine que la dirigeante puise sa vision du monde. « En effet, celle-ci m'a permis d'être exposée à notre legs culturel millénaire très jeune. J’ai donc, très tôt, su ce que je voulais être et ce que je voulais faire. J’avais une grande envie de travailler quelque part en Afrique après mes études au Canada, même si je ne savais pas où cela allait être exactement sur le continent. » précise la Directrice Générale de Société Générale Cameroun avec au passage des compliments pour son nouveau pays d’accueil « J’ai été dans des pays qui m’ont particulièrement marquée par leur beauté naturelle, la qualité de leurs hommes et femmes, et le Cameroun, véritable Afrique en miniature, ne dément pas mes premières expériences africaines. J’ai trouvé ici le charme et la qualité qui font les grandes nations et je m’y plais. »
De l’effort supplémentaire demandé aux femmes aux difficultés d’expatriation
Tout au long de sa carrière Mareme MBAYE NDIAYE a toujours eu l’impression qu’une femme doit faire un effort supplémentaire pour prouver dans tout ce qu’elle entreprend, car les attentes sont en général plus élevées pour elles. « Et pourtant, nous sommes tout simplement des humains avec des émotions, confrontées à des défis et des responsabilités, avec la possibilité de faire des erreurs. » précise-t-elle.
Avant de revenir sur son propre cas « En tant que jeune femme africaine essayant de gravir les échelons de l'entreprise tout en construisant une vie de famille saine, cela a été plutôt exigeant mais pas insurmontable. J'ai compris à travers cette expérience la vraie importance de l'équilibre travail-vie personnelle. »
Et quand les préjugés sur la jeunesse s’y rajoute, il faut parfois se référer à d’autres dirigeantes pour surmonter les obstacles. « Par exemple, de nombreux Gambiens, qui m'ont trouvée jeune à l'époque, ne pouvaient pas simplement comprendre comment une multinationale me nommait Directrice Générale à l'âge de 32 ans. Ma réponse a toujours été "être une femme avec une famille, c'est déjà être un leader", comme le rappelait Nancy PELOSI, première femme présidente du Congrès américain à ses détracteurs. » se souvient Mareme MBAYE NDIAYE.
Pour autant les conditions de vie en mobilité restent les principales difficultés qu’elle a rencontrées. « J’ai passé une partie de ma carrière en expatriation, assumant d’importantes responsabilités de direction. Cela exige une forte organisation. » affirme la DG qui donne en même temps ses conseils pour réussir l’expatriation « Le travail acharné, la crédibilité, la construction d'une réputation basée sur la confiance, la rupture, les bonnes valeurs, le professionnalisme, m'ont aidé au fil des ans à surmonter tous les obstacles sur mon chemin. J'encourage donc d'autres jeunes professionnelles à en faire de même. »
Un engagement pour les femmes
Pour Mareme MBAYE NDIAYE, l’équité des genres devrait être une responsabilité et un engagement pour toutes les entreprises, qu’elles soient grandes ou petites. Elle explique pourquoi « Pour moi, opter pour la promotion des femmes au sein de nos organisations de manière générale crée un modèle générateur de valeur ajoutée pour l’entreprise et la communauté dans son ensemble.
Sur notre continent, comme dans d’autres géographies, il subsiste malheureusement un plafond de verre que les femmes sont peu nombreuses à franchir. »
Et poursuit en citant l’engagement de son entreprise « Depuis quelques années notre Groupe travaille, à travers une initiative baptisée « Diversity for Africa », à développer la diversité et accroître la représentation féminine dans l’encadrement et les premiers résultats sont là : le pourcentage de femmes dans nos Comités de direction a augmenté de 4 points pour passer à une moyenne de 25% environ. »
Avec une mention spéciale pour la filiale placée sous sa direction « Au niveau du Cameroun nous allons encore plus loin, avec 40% de femmes aujourd’hui dans le Comité de Direction, cela avec une grande diversité dans les métiers, du commercial aux fonctions supports. Au niveau de notre management intermédiaire également, nous œuvrons à développer les compétences de nos collègues femmes à travers des programmes d’encadrement qui permettent globalement d’améliorer l’équité dans la gestion de carrière des collaborateurs quel que soit leur genre et encadrer les évolutions de carrières dans une logique de compétence, de responsabilité et d’exigence (égalité des chances à compétences égales). Nous veillons également à promouvoir un environnement de travail de nature à faciliter l’engagement de toutes et tous, de faire de la diversité l’affaire de toutes et tous et, parce qu’elles sont victimes de barrières culturelles, d’inciter les femmes à s’investir dans leur développement personnel. » détaille Mareme MBAYE NDIAYE.
Mais globalement, elle note que « Toute femme dirigeante a déjà été confrontée à des défis similaires au cours de sa carrière, c’est-à-dire d’avoir à plus prouver que ses homologues masculins, que ce soit dans sa posture ou ses performances. Par conséquent, quand elle évolue dans le management de l'entreprise grâce à son travail, elle doit transformer chaque défi en une opportunité d'exceller et de fournir des résultats. » et propose une solution « En fin de compte, la seule façon de juguler cette attente injuste est de veiller à ce que les femmes qui réussissent encadrent d'autres jeunes femmes professionnelles afin que nous puissions avoir de nombreuses femmes dirigeantes à des postes clés, créant ainsi une bonne masse critique et un cercle vertueux, démontrant, du fait de cette nécessité, notre capacité à diriger et à gérer correctement et efficacement. »
Afin de joindre l’acte à la parole, elle rappelle son propre engagement « Personnellement, je m’investis dans des programmes de coaching. J’ai ainsi, entre autres, des responsabilités de mentor. A ce titre, j’encadre des collaboratrices au sein du Groupe et de notre entreprise, dans l’objectif d’accélérer leur développement et maximiser leurs chances de réussite. D’autres dirigeantes et managers femmes sont également appelées à remplir ces missions. »
La finance, un catalyseur du développement et un entrepreneuriat féminin à encourager
Mareme MBAYE NDIAYE croit fermement au levier de l’accès au financement pour l’amélioration des conditions de vie des populations. Démonstration : « Voyez-vous, lorsqu'un entrepreneur a accès au financement, cela lui permet de développer son entreprise et de créer des emplois. Ces emplois à leur tour sortiront de nombreuses personnes de la pauvreté et contribueront à l'amélioration du niveau de vie au sein de la communauté. C'est ce qui m’inspire et me fait avancer tous les jours. Notre métier c’est plus que de la banque. Il offre des opportunités et des perspectives à de nombreuses personnes et organisations. Je suis par ailleurs impressionnée par les talents et la détermination de nombreux jeunes entrepreneurs sur le continent. Leur potentiel, s’il est développé, peut faire émerger de véritables champions africains. » argumente-t-elle.
Avant de mettre en exergue l’importance de l’entrepreneuriat féminin en Afrique « Je suis particulièrement séduite enfin, par le nombre croissant de femmes entrepreneures à travers le continent. Cela doit être davantage encouragé et soutenu pour aider à attirer davantage de femmes à entreprendre, activité où elles excellent habituellement. Les Africaines sont les plus entreprenantes. Tenez, d'après la dernière étude sur le sujet publiée par le cabinet Rolland Berger pour Women in Africa, près de 24 % des Africaines en âge d'exercer un emploi sont impliquées dans la création d'entreprises. C'est bien plus que partout ailleurs. À titre de comparaison, le même taux est de 11 % en Asie du Sud-Est et dans le Pacifique, des régions pourtant parmi les plus pourvoyeuses d'entrepreneurs. Toujours selon l'étude, l'entrepreneuriat féminin engendrerait entre 250 et 300 milliards de dollars américains, soit environ 12 à 14 % du PIB de l’ensemble de l’Afrique. »
Dès le 5 Juillet, Mareme
MBAYE NDIAYE prendra ses fonctions de Directrice Régionale Afrique Centrale et
de l’Est de Société Générale.
TT