Mesdames, négociez aussi bien que Jennifer Lawrence !


Mesdames, négociez aussi bien que Jennifer Lawrence !
@Les Echos Entrepreneurs
  • 23 Mars 2023
Peu de femmes aiment négocier, assure la professeure en marketing Zoe Chance. En moyenne, elles demandent moins que les hommes, ou, pire, elles n'osent tout simplement rien demander.

À l'âge de 24 ans, Jennifer Lawrence avait déjà remporté un Oscar et avait été désignée par « Time » comme l'une des cent personnes ayant le plus d'influence. Etant donné sa détermination et son succès, on pourrait croire que Jennifer Lawrence réussissait aussi ses négociations. Mais lorsque le système de courriel de Sony Pictures a été piraté en 2014, elle a découvert, comme le reste du monde, qu'elle avait été payée des millions de dollars de moins que ses collègues covedettes masculines pour « American Bluff », Bradley Cooper et Christian Bale.
Peu de femmes aiment négocier. L'une des raisons pour lesquelles l’idée de négocier peut nous rebuter est la crainte d'être jugées pour avoir demandé, ou pour avoir demandé trop. Ce n'est pas insensé. Parfois, nos demandes entraînent des conséquences négatives.
Les femmes ont moins d'amis au travail
Vers l'époque où Jennifer Lawrence négociait son contrat, Angelina Jolie était traitée d'enfant gâtée en raison de ses exigences contractuelles. On nous traite parfois de garces lorsque nous recherchons ou utilisons le pouvoir. On n'accuse jamais les hommes d'être autoritaires. Cela ne signifie pas que nous ne pouvons pas demander ce que nous voulons. Nous devrions le faire. Cela signifie seulement qu'il existe des vagues sexistes à travers lesquelles nous devrons évoluer, comme l'attente selon laquelle les femmes doivent être chaleureuses et la tendance des gens à se sentir offensés lorsque nous disons les choses carrément, au lieu de mettre nos gants blancs.
Lorsqu'il s'agit de déterminer quoi demander et combien demander, et ce que devraient être leurs limites, les femmes sont désavantagées. Du moins est-ce vrai au travail, où nous avons habituellement moins d'amis que les hommes n'en ont. Si Jennifer Lawrence avait été plus proche de Bradley Cooper et de Christian Bale, elle aurait peut-être été plus à l'aise pour demander : « Hé, qu'est-ce qu'ils vous offrent ? »
Demander autant que les hommes
Quand les femmes fixent leurs objectifs de négociation aussi haut que le font les hommes, elles ont tendance à s'en tirer aussi bien que ces derniers. Cela démontre que les résultats dépendent beaucoup plus de combien on demande que de la façon de le demander, aussi important que cela puisse être.
Lorsque l'économiste Nina Roussille a analysé les données de milliers d'ingénieurs en quête d'emploi sur une plateforme en ligne, elle a découvert que « la différence de genre dans les salaires demandés explique pratiquement tous les écarts dans les offres. Je ne trouve aucune preuve de discrimination à l'encontre des femmes. En fait, en fonction des caractéristiques de leur CV, les femmes reçoivent légèrement plus d'offres que les hommes et, selon l'évolution de l'entretien, les femmes sont tout aussi susceptibles que les hommes de recevoir une offre finale ».
Autrement dit, du moins dans ce cas, les employeurs sont disposés à rémunérer les femmes aussi bien que les hommes, mais nous devons assumer la responsabilité de demander autant que les hommes, autant de fois qu'il le faut.
Les femmes n'osent pas demander
Nous avons parlé de situations dans lesquelles des négociations sont déjà en cours, mais l'une des plus grandes différences relatives au genre, à ce stade, est que les femmes sont beaucoup moins susceptibles que les hommes de se rendre compte qu'elles peuvent négocier. De nombreux sondages, études sur le terrain et expériences ont mené à la conclusion que l'écart entre les genres dans les négociations est plus grand lorsque la situation est ambiguë.
Lorsque la professeure de marketing Deborah Small et ses collègues ont amené des participants au laboratoire pour les faire jouer au jeu de mots Boggle, les joueurs se sont entendu dire qu'ils seraient payés entre trois et dix dollars. À la fin du jeu, un chercheur a calculé le pointage, et leur a remis trois dollars en disant : « Voici trois dollars. Cela vous convient-il ? » Tous ceux qui ont demandé davantage ont reçu plus d'argent. Ils pouvaient obtenir jusqu'à dix dollars, s'ils le demandaient. Seulement 3 % des femmes ont demandé plus, alors que 23 % des hommes l'ont fait.
L'année qui a suivi le piratage du système de courriel de Sony Pictures, Jennifer Lawrence est retournée à la table de négociation, cette fois pour un rôle principal dans le film « Passengers ». J'ignore le salaire cible qu'elle a demandé, mais je sais que la somme de 20 millions de dollars qu'elle a négociée a fait d'elle l'actrice la mieux payée de Hollywood, et je sais aussi qu'elle a gagné 8 millions de plus que sa covedette masculine.

Source: Les Echos Entrepreneurs

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