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Start-up née en 2020, Manita permet aux femmes de jouer au foot sur leur temps libre ou avec leurs collègues de travail. Une démarche militante pour les aider à gagner en confiance.
« Ce matin, j’ai reçu un message d’une fille qui me dit qu’elle a envie de monter une équipe de foot mais qu’elle ne sait pas comment faire. C’est souvent comme ça que ça commence. » En 2020, Camille Amar a monté Manita, une start-up qui donne la possibilité aux jeunes femmes de pouvoir jouer au football entre elles et dans une structure cadrée. L’idée est partie de son expérience personnelle. « Dans mon entreprise, en 2016, les hommes jouaient au foot entre eux, tous les mardis. »
Adolescente, Camille avait testé d’autres sports, comme la boxe, le tennis, l’escrime, l’athlétisme, mais jamais le foot. « Je ne m’étais jamais demandé si je pouvais jouer avec mes collègues. » Jusqu’au jour où un joueur manque à l’appel. On lui propose alors le rôle de remplaçante. « Je me suis dit que j’ai eu de la chance qu’on me le suggère. Mais que ce n’était peut-être pas le cas de toutes les femmes. Alors j’ai voulu rendre le foot accessible pour elles. Qu’elles puissent, elles aussi, se dire « on veut faire un match de foot ? alors on le fait, comme les mecs. ». » Au moment de monter sa start-up, Camille a compris qu’elle ne devait pas juste mettre en relation des personnes qui voulaient jouer au ballon rond mais qu’il lui fallait changer toute une réflexion sociale. « C’est nécessaire de permettre aux femmes d’avoir ce premier déclic. »
Une fois cette barrière dépassée, il y a la barrière matérielle. Le manque de sections féminines, d’associations à proximité, et le fait que certains clubs fassent de la compétition alors qu’il y a des femmes qui veulent tester le foot comme débutantes. Sans oublier l’emploi du temps qui ne correspond pas. « Pour faire partie d’un club, il faut s’entraîner tard et certaines structures ne sont pas proches géographiquement. » C’est sans compter les murs psychologiques : commencer trop tard, jouer avec un statut de débutante, s’imposer dans une équipe… « Tous ces obstacles qui empêchent les femmes de venir tâter le cuir, alors que c’est le sport le plus populaire au monde. » Avec Manita, Camille a donc imaginé deux offres.
’un côté, des sessions de jeu auxquelles participe en toute liberté la communauté de joueuses. « Sur notre site, les femmes peuvent s’inscrire à nos sessions. Il y a quatre niveau de jeu, différents créneaux horaires et différents lieux. Elles peuvent venir à la fréquence souhaitée et réserver une session, ou un nombre de sessions. » De l’autre, des tarifs pouvant aller d’environ 11 euros le match à 16 euros pour une session d’entraînement et match. « Aujourd’hui, on a fait jouer plus de 1000 joueuses en région parisienne. » La communauté de joueuses est animée par des tournois. « Pour qu’elles se sentent bien, on donne la priorité à la bienveillance, à l’absence des complexes, à la sororité. On les met dans un cocon où elles seront heureuses de jouer. Certaines savent qu’à Manita, elles risquent de jouer avec des filles de niveaux différents, mais elles s’en moquent, car on est là pour être ensemble. »
Depuis 2021, Manita propose aussi une activité auprès des entreprises. « Des salariées d’une boîte nous avait contactés en nous disant qu’elles voulaient créer une équipe féminine mais qu’elles n’arrivaient pas à la pérenniser. » Difficulté à trouver des joueuses, à remplacer certains éléments, à relancer pour les créneaux… La start-up accompagne donc les joueuses en assurant le suivi des sessions d’entrainement, en faisant vivre l’équipe, en orchestrant des tournois avec d’autres effectifs d’entreprises. « S’il y a une annulation de dernière minute, grâce à notre communauté en ligne, on va facilement réussir à leur trouver une joueuse surmotivée. » Avec les entreprises, Manita travaille aussi sur l’organisation d’évènements. « On leur suggère de sponsoriser des évènements engagés sur les femmes et la parité, mais pas que dans le sport. On prévoit un tournoi avec Deezer et Le Bon Coin sur la parité dans la tech. »
Grâce aux réseaux sociaux et aux joueuses de foot très actives, Manita a vite vu sa communauté grandir. Parfois, la start-up a pu s’avérer être une belle porte d’entrée vers des clubs plus classiques. « Certaines joueuses avaient envie de prendre du niveau avant de rejoindre un club et on propose du foot à cinq ou à sept. Cela leur a permis de monter en compétences. Il arrive aussi qu’on mette en contact des clubs et des joueuses. » Mais si certaines associations sportives sont de plus en plus inclusives, Camille Amar interpelle les clubs. « Même si on veut pousser vers une pratique plus institutionnelle, on pense que les clubs doivent être encore plus inclusifs et ouverts. Il reste beaucoup de choses à faire dans ces structures. »