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Le groupe américain de cosmétiques brise quelques tabous. Il a nommé Sue Y. Nabi, ex-présidente de Lancôme, à sa tête. C'est la première femme nommée à ce niveau de responsabilité parmi les géants mondiaux de la beauté. Sa mission sera de relancer un groupe qui a du mal à intégrer la division beauté de P & G.
Coty a trouvé chaussure à son pied et bouscule le monde de la beauté. Le groupe de cosmétiques américain vient de nommer une femme, Sue Y. Nabi, l'ex-présidente de Lancôme, comme directrice générale. Elle succédera en septembre à Peter Harf, fondateur et associé de JAB Investors, le holding familial des Reimann, propriétaire de Coty. Ce dernier qui a assuré quelques mois la transition à la tête du groupe, deviendra son président, et « travaillera en étroite collaboration avec Nabi pour diriger la transformation de Coty ».
Avec cette nomination, Coty crée la surprise. D'abord, parce qu'il s'agit de la première femme nommée à ce niveau de responsabilité parmi les géants mondiaux de la beauté. Ensuite, parce qu'il s'agit d'une personnalité atypique, déjà bien connue dans le secteur. Sue Y. Nabi a fait une longue carrière chez L'Oréal, le leader mondial des cosmétiques. Entrée en 1994 dans le groupe, elle a rejoint Gemey, avant de diriger L'Oréal Paris, puis en 2009 Lancôme, la première marque mondiale de luxe, qu'elle arrive à relancer, avant de démissionner en 2013. On lui doit l'utilisation du célèbre slogan « parce que nous le valons bien » chez L'Oréal Paris ou la campagne avec Jane Fonda, alors âgée de 68 ans. Autre succès lié à celle qu'on surnommait la diva, le lancement du parfum La Vie est belle.
Un riche parcours professionnel, donc. Son parcours personnel l'est tout autant. La nouvelle dirigeante n'a jamais caché son combat qui l'a amenée à changer de sexe. Née Youcef, en Algérie en 1968, elle est devenue une femme dans les années 2000 à une époque où ces choix n'étaient guère acceptés. Avec cette nomination, Coty fait d'une pierre deux coups, en recrutant une pro de la beauté, et une personnalité en phase avec l'air du temps, à l'heure des débats sur la diversité et l'inclusion.
Pour Coty, il s'agit d'une étape clef dans sa transformation. Le groupe, qui a vu son chiffre d'affaires plonger de 8 % lors de son dernier exercice (à 8,6 milliards de dollars), a décidé de se recentrer sur son activité parfums, dont il est le numéro un mondial, les soins et le maquillage.
Pour cela, l'américain a annoncé en mai la création d'une coentreprise à 40/60 avec KKR pour y loger sa division de coiffure professionnelle. Avec les soins capillaires Wella, les colorations Clairol et les vernis à ongles OPI, cela en fait le numéro deux mondial du secteur. Des liens persisteront en termes de compétences entre les deux entreprises. Les moyens de Coty seront donc consacrés à ses produits de luxe, comme sa licence Gucci ou Hugo Boss qui se portent bien. La division en lien avec la grande distribution est, elle, en difficultés et cherche à se renouveler. « Sue est reconnue comme une dirigeante visionnaire, une innovatrice dont l'extraordinaire créativité et les inspirations uniques sont célébrées par l'industrie de la beauté », a souligné Peter Harf.
Pour se relancer, Coty mise sur les jeunes générations. Dans ce but, il a pris il y a quelques jours une participation de 20 % dans l'activité beauté de l'icône de la téléréalité, Kim Kardashian West. Une opération à 200 millions de dollars, qui fait suite à une autre acquisition stratégique en janvier, avec la reprise de 51 % du capital des marques de Kylie Jenner, la demi-soeur de Kim Kardashian West. L'accord s'était élevé à 600 millions. Car les deux demi-soeurs, stars des réseaux sociaux, n'ont pas les mêmes publics. Si la première séduit les clients de 25 à 30 ans, Kylie, elle, recrute ses fans parmi les 15-25 ans.
Dans quelques mois, Sue Y. Nabi dévoilera ses priorités pour le groupe, afin de mieux coller aux tendances en pleine évolution. Après son départ de L'Oréal, l'ex-DG de Lancôme avait créé en 2014 à Londres, Orveda, une marque de soins végan de luxe. Là encore avec un temps d'avance sur le marché. Sa mission pour redresser Coty est compliquée. Le groupe est en difficulté depuis l'intégration de l'activité beauté de P & G en 2016. Il a changé quatre fois de directeur général en moins de quatre ans.
Source : Les Echos