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Les États-Unis ont annoncé mercredi 29 décembre la nomination d'une émissaire spéciale pour les femmes afghanes, une priorité affichée de l'administration américaine depuis que les talibans ont pris le contrôle du pays. Rina Amiri, une Américaine née en Afghanistan qui avait travaillé dans l'administration de l'ex-président Barack Obama, sera l'émissaire spéciale du président Joe Biden pour les droits des femmes et des filles afghanes et les droits humains en Afghanistan, a annoncé le chef de la diplomatie américaine Antony Blinken.
En quête de reconnaissance internationale, les talibans se sont engagés à gouverner moins brutalement que lors de leur premier règne (1996-2001), mais les femmes sont toujours largement exclues de la fonction publique et de l'accès à l'éducation secondaire. Les talibans ont aussi émis des recommandations demandant aux conducteurs de ne pas circuler avec des femmes sur de longues distances si elles ne sont pas accompagnées.
Rina Amiri s'en était offusquée. «Je me demande comment ceux qui ont redonné une légitimité aux talibans en assurant au monde qu'ils avaient évolué peuvent expliquer le retour des politiques draconiennes et régressives à l'encontre des femmes», avait-elle tweeté. «Nous n'allons pas permettre à quiconque de représenter notre peuple ou l'une de ses factions», a réagi auprès de l'AFP Mohammad Naeem, un porte-parole des talibans, «seul le système islamique au pouvoir peut représenter la nation afghane, c'est tout.» «Des étrangers ne peuvent pas guérir les blessures de notre peuple. S'ils pouvaient, ils l'auraient fait ces 20 dernières années», quand les Occidentaux contrôlaient Kaboul, a-t-il ajouté.
Rina Amiri, 53 ans, a quitté l'Afghanistan enfant, lorsque ses parents émigrent en Californie. Encore étudiante à la Tufts University à Boston, elle s'était fait connaître en protestant contre le régime des talibans après les attentats du 11-Septembre qui ont provoqué l'intervention américaine en Afghanistan. «Les États-Unis et l'Europe devraient aller au-delà des échanges avec les talibans limités à l'évacuation de leurs ressortissants et alliés et à la coordination de l'accès à l'aide humanitaire», a-t-elle estimé dans un article publié en septembre par la revue Foreign Affairs. «L'aide humanitaire seule n'empêchera pas l'effondrement de l'économie ni l'aggravation de la radicalisation et de l'instabilité», ajoutait-elle. Selon elle, le Pakistan, allié historique des talibans, n'a pas suffisamment insisté sur les droits des femmes dans ses relations avec les talibans.
Le respect des droits des femmes est une des conditions exigées par les donateurs pour la reprise de l'aide internationale à l'Afghanistan. Pays parmi les plus pauvres du monde, l'Afghanistan est au bord de l'effondrement économique et l'ONU a mis en garde contre une «avalanche de faim» à venir, estimant que 22 des quelque 40 millions d'Afghans risquent de souffrir de pénuries alimentaires «aiguës» cet hiver.
Joe Biden était décidé depuis longtemps à mettre fin à la plus longue guerre de l'histoire américaine. Une récente biographie de Richard Holbrooke rapporte un vif échange sur ce sujet entre le diplomate américain et M. Biden, alors vice-président, qui aurait lancé: «Je ne vais pas renvoyer mon fils là-bas pour qu'il risque sa vie pour les droits des femmes!»
Source : AFP